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Une étude dans le Morbihan le prouve
Les nitrates bretons ont la vie dure

Il faudrait entre cinq et dix ans pour résorber l'excès de nitrates en Bretagne, même si des mesures draconiennes étaient prises dès aujourd'hui. C'est ce qui ressort d'une étude sur le bassin versant de Kervidy-Naysin dans le Morbihan.

Voir le commentaire du Houx Vert

LORIENT. Depuis 1997, une équipe de l'Inra (Institut national de recherche agronomique) et de l'Ecole nationale agronomique de Rennes, en collaboration avec l'Université de Rennes 1, étudie le bassin versant de Kervidy-Naizin, au cœur du Morbihan. Objectif: analyser le mécanisme de circulation de l'eau.

"Cette zone de 5km², où la terre limoneuse descend en pente douce sur du schiste, est représentative de l'agriculture intensive bretonne mais elle n'a rien d'exceptionnel, précise Chantal Gascuel, de l'Inra. Le maïs et le blé sont les cultures dominantes. La concentration porcine est un peu au-dessus de la moyenne régionale. Celle des bovins (3000) est en dessous. " Or, ici, alors que la limite autorisée est de 50 milligrammes par litre d'eau, les scientifiques ont trouvé "des concentrations en nitrates de 140 à 180 milligrammes par litre dans la partie amont et de 80 à 90 milligrammes dans le ruisseau en contrebas", explique Chantal Gascuel.

Les chercheurs ont constaté que, "dans la partie amont, en hiver, la nappe phréatique remonte jusqu'à 6 à 8m de la surface. L'été, elle se trouve à une quinzaine de mètres de profondeur". Alors, pour " mieux comprendre comment l'azote et les éléments chimiques des parcelles agricoles passent, dans le sol et le sous-sol", vers le Coët-Dan, un petit ruisseau qui coule en bas des parcelles, des tubes ont été enfoncés dans les terrains. Ils ont permis, avec le concours des agriculteurs, de faire des observations et des prélèvements dans la nappe.

Les échantillons d'eau prélevés tous les quinze jours ont livré leurs secrets. "La concentration en nitrates dans le ruisseau est plus forte en hiver, lorsque la nappe gonfle et alimente la rivière." C'est donc la nappe, elle-même chargée en nitrates, qui est à l'origine de cette teneur dans le ruisseau. Et "ce phénomène est plus important que le lessivage annuel de l'azote avec les pluies". Résultat: le stock de nitrates ne s'écoule que tout doucement.

Et même les mesures les plus radicales, comme l'interdiction de l'épandage ou des engrais chimiques, n'auraient pas d'effet avant cinq à dix ans." Il ne faut surtout pas décourager les agriculteurs, conclut Chantal Gascuel Leur prise de conscience est réelle. Les actions mises en place doivent s'inscrire dans le long terme." Jean-Paul LOUÉDOC.

Commentaire du Houx Vert : Pour la première fois peut-être, la catastrophe que représente l'empoisonnement des eaux, et notamment de la nappe phréatique (180 milligrammes par litre !!!), par l'agriculture intensive est complètement dévoilée. Bravo à l'équipe scientifique à qui nous devons cette révélation ! Par contre, nous ne partageons pas l'optimisme des chercheurs quant à la " prise de conscience des agriculteurs ". Voilà 10 ans pour le moins qu'on nous parle de cette prise de conscience, or les choses n'ont fait qu'empirer malgré la distribution d'importantes subventions par l'Etat.

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