Retour accueil

30 SEPTEMBRE 1999
L'ACCIDENT DE TOKAI-MURA
N'OUBLIONS PAS !!

Le Japon sous le choc après la mort de l'irradié de Tokai-mura

Après l'accident nucléaire du 30 septembre, la police enquête.

Par FRÉDÉRIQUE AMAOUA

L'émotion était immense hier au Japon après l'annonce du décès de l'un des deux employés de l'installation nucléaire de Tokai-mura exposés à de très fortes radiations lors de l'accident de «criticité» survenu le 30 septembre.

Hisashi Ouchi, 35 ans, est la première victime d'un incident radioactif au Japon depuis les débuts du nucléaire civil, il y a plus de quarante ans. «Profondément coupables». «En tant que médecin, je suis scandalisé que des vies humaines aient pu être risquées avec autant de légèreté dans cette usine, a déclaré Kazuhiko Maekawa, chef de l'équipe médicale en charge de l'employé mort, visiblement très ému.

Un accident de ce genre ne doit plus jamais se produire. A l'heure qu'il est, les responsables doivent se sentir profondément coupables.» Ouchi est décédé à la suite de la défaillance de plusieurs organes vitaux après avoir subi quatre-vingt-trois jours de traitements intensifs jamais tentés nulle part au monde. «Nous avons beaucoup appris de ces deux mois et demi de traitement, mais nous avons aussi pris conscience des limites de la médecine d'aujourd'hui», a ajouté le professeur Maekawa.

Lors de l'accident, Ouchi a été exposé à des radiations 17 000 fois supérieures à l'exposition annuelle maximum permise au Japon. Selon les experts, ses chances de survie ne devaient pas dépasser une dizaine de jours. Mais les médecinsjaponais, aidés de spécialistes étrangers, ont déployé des moyens exceptionnels pour le maintenir en vie.

Laxisme. Le travail d'Ouchi et de deux de ses collègues consistait à dissoudre de la poudre d'uranium dans de l'acide pour fabriquer ducombustible destiné aux réacteurs nucléaires. Suivant les procédures incroyablement laxistes en vigueur dans son installation, ce technicien entré chez JCO, le propriétaire de l'usine, à l'âge de 18 ans sans formation spécifique, devait verser l'uranium manuellement dans la cuve de préparation, à l'aide d'un seau, après avoir grimpé l'escalier adjacent pour se placer juste au-dessus de la cuve. Une manipulation risquée si la quantité d'uranium n'est pas scrupuleusement dosée. Pour une raison inexpliquée, ce dernier a versé une quantité huit fois supérieure à la dose prescrite, déclenchant un accident de «criticité», c'est-à-dire une réaction en chaîne entraînant une irradiation intense.

Ouchi a été le plus gravement atteint des trois. Après l'accident, ses globules blancs ont chuté à un niveau proche de zéro, le privant de défense immunitaire. Les chirurgiens ont alors tenté une greffe de moelle épinière, provenant de son frère. Mais, le 27 novembre, son état a brusquement empiré à la suite d'un arrêt cardiaque. Afin de le maintenir en vie, les médecins étaient contraints de lui injecter chaque jour dix litres de liquide lymphatique et de sang.

Perquisitions. L'entourage du jeune homme rejette depuis le début la thèse de l'erreur humaine. Décrit par tous comme un homme très sérieux, scrupuleux, il a forcement obéi à des ordres lorsqu'il a versé la dose fatale. Des ordres de qui? La police a effectué plusieurs perquisitions au siège du groupe Sumitomo Metal Mining, la maison mère de la société JCO, pour tenter de répondre. Des poursuites pour homicide involontaire pourraient être engagées rapidement.

Désormais, selon les sondages, une forte proportion de Japonais redoute un nouvel accident majeur. La confiance du public dans la filière nucléaire est au plus bas.

Reseau "Sortir du nucleaire"

Federation de 487 associations antinucleaires

9 rue Dumenge F-69004 LYON (France)

Email : rezo@sortirdunucleaire.org

http://www.sortirdunucleaire.org